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21 décembre 2012 5 21 /12 /décembre /2012 21:57

Les marathoniens effectuent leur baroud d'honneur

Traduction d'une pièce de Dušan Kovačević

 

 

Acte 1 Dans la maison de la dernière négociation

 

Epoque : 23-07-1972. Environ 17 heures.

 

Le lieu : Grande, vaste pièce aménagée de manière hétéroclite : une armoire de 1846, un chandelier à trois branches fabriqué en 70, un lustre classique en cristal - orné d'une toile d'araignée -, de lourds rideaux noirs, une table de l'époque royale avec quatre chaises, une radio antédiluvienne, une télé et une étagère à livres.  

 

 

Les acteurs : La pièce est encore vide. On n'entend se mouvoir que les rideaux. Le calme apparent est troublé par le vrombissement de l'automobile dans la cour. Après un certain temps, ce bruit disparaît aussi... Laki entre le premier : grand bonhomme robuste. Vêtu sportivement, il  porte une veste négligée. Mirko rentre après lui : jeune homme maigrelet, il tient dans ses deux mains une canne à pêche.  Laki est assis sur le bord de la table. Silencieux, il regarde Mirko. D'un hochement de la tête, il lui fait signe de s'asseoir.  De manière affecté, ce dernier se laisse tomber sur la chaise, croise ses jambes et, lentement, dort de sa poche une boîte à cigarettes. Il demande s'il peut fumer. Laki acquiesce d'un air désintéressé. Mirko allume sa cigarette. Il rejette sa fumée vers le lustre. Laki le fixe avec mépris ; il sort de la poche de sa veste un chewing-gum et, nerveusement, froisse le papier, puis le jette par dessu ses épaules. Il mâche. Tout en lorgnant sur son fils, il lui demande d'un ton hésitant :


Laki : Tu refuses ?

Mirko : Je refuse.

Laki : Tu refuses ?

Mirko : Non.

Laki (fait le constat) : Tu refuses... Donc tu ne veux pas.

Mirko : Je te l'ai déjà dit !

Laki : Oui, oui, oui... Mais que pouvais-je attendre d'autre ? Comme si je ne te connaissais pas... Comme si tu n'étais pas mon fils. Que tu veuilles au moins choisir un boulot un jour ! Non, rien ! que des illusions. Mais ce qui me dupe continuellement, c'est que je suis ton père. Cela me leurre dangereusement... dangereusement... Tu vois dans quelle situation l'on se trouve. Il n'y a presque plus de travail. Nous fermerons bientôt boutique. On doit...

Mirko : Je sais, je sais tout.

Laki : Qu'est-ce que tu sais ? Nom de dieu ! Qu'est-ce que tu sais ?

Mirko (d'une voix ironique, vive et directe) : Qu'ils sont vieux ! que de durs moments arrivent. Que je suis jeune. Que vous comptez sur moi. Que moi aussi j'aurai un fils. Que je m'installerai demain...


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